ALBERS, Josef, Interaction of color, New Haven, Yale University Press, 1963.
ALBERS Josef, L’Interaction des couleurs, Paris, Éditions Hazan, 2021.

Josef Albers élabore L’Interaction des couleurs dans le cadre d’une étude expérimentale. C’est en 1960 qu’il commence ses recherches, aidé de ses étudiants de l’université de Yale aux États-Unis.

En admettant la relativité de notre perception, Josef Albers se questionne sur l’impact des couleurs entre elles mais aussi sur celui qui les perçoit. Selon lui, la couleur est le moyen d’expression artistique le plus relatif car on ne voit jamais une couleur déconnectée et indépendante d’autres couleurs. En partant de ce principe, la couleur est donc continuellement influencée par ce qui l'entoure et ne peut par conséquent être pleinement elle-même. Elle dépendra de nombreuses conditions environnementales telles que la lumière, les formes. C’est en modifiant ces paramètres que l'œil peut se retrouver piégé par des mécanismes visuels qui dépassent l'œil humain.

À travers son travail de recherche, Josef Albers effectue de nombreux exercices démontrant le fonctionnement de ces mécanismes perturbateurs. Dans un premier temps, il soutient que pour mener à bien son étude il est indispensable d’utiliser du papier de couleur. Pratique peu courante pour étudier la couleur mais il justifie son choix en deux points. Le papier de couleur n’est pas cher contrairement au matériel de peinture et il possède des qualités graphiques qui permettent une manipulation simple et efficace de par sa couleur uniforme sans texture.

Dans un second temps, il explore. Josef Albers soutient que la pratique est la clé. Il inverse le système universitaire classique car il met en avant la pratique et fait passer la théorie au second plan, ce qui permet à ses étudiants de développer leur créativité et leur curiosité intellectuelle. À travers ses différents exercices il permet à l'étudiant de rendre compte par l’essai et l’erreur comment obtenir des résultats. Il recrée les situations d’illusions pour en comprendre le fonctionnement. Chaque chapitre est articulé selon sa notion d'illusion et un visuel qui permet largement de comprendre l’exercice réalisé par les élèves.

Par exemple, on retrouve dans le chapitre 12 le mélange optique dans lequel Josef Albers explique le principe de ce procédé, notamment utilisé par les pointillistes qui utilisent deux couleurs côte à côte pour donner l’illusion d’une autre. Le cerveau fait automatiquement le mélange. À travers une note il nous renvoie au visuel approprié qui nous incluse directement dans son cheminement de penser car on se retrouve témoin et cobaye de son expérience. L’illustration est primordiale dans son ouvrage car il explique ses recherches en s’appuyant sur un exemple.

Josef Albers remet largement en cause le système d'apprentissage des couleurs car il remet en question le point de vue de son collègue du Bauhaus, Vassily Kandinsky qui accordait une valeur absolue aux couleurs. Il propose de son côté une nouvelle perception de la couleur, déterminée principalement par la capacité à l'œil humain d'appréhender l’illusion qui peut être conditionnée par des choses que l’on pouvait trouver évidente à première vue tel que l’éclairage.

Dans le chapitre 17, il évoque la couleur volume, un système basique de changement de couleur par le volume rattaché à la couleur. Il est important d'admettre et reconnaître le fonctionnement de ces systèmes de modification des couleurs afin de mieux les lire. Il prend l'exemple du thé, il apparaît plus clair dans une cuillère que dans une tasse. Le volume n’est pas le même dans les deux cas et modifie l’intensité de couleur de ce même liquide.

L’intérêt de ce ouvrage est de montrer que, en design, la couleur est essentielle, elle est le premier message visuel transmis au cerveau. À partir de cette première impression, on est attiré ou non vers un objet, un graphisme. Dans notre quotidien, nous sommes constamment entourés d’objets et il est important d’admettre que les qualités plastiques de ceux-ci font émerger un rapport spécial entre l’homme et l'objet.

Thalia, AZOUT, Licence 3 « Design, Arts, Médias », Paris 1 Panthéon-Sorbonne, 2021-2022.