1. Définition

Le Larousse nous propose la définition suivante du mot « confort » :

« 1. Ensemble des commodités, des agréments qui produit le bien-être matériel ; bien-être en résultant

  1. Bien-être, aisance qu'apportent un vêtement, une pièce de mobilier, un véhicule, etc.
  2. Tranquillité psychologique, intellectuelle, morale obtenue par le rejet de toute préoccupation. »

Dictionnaire Larousse, [en ligne], URL : https://www.larousse.fr/dictionnaires/francais/confort/18147

Ce qui nous intéresse ici, dans le cadre du design, est le principe de bien-être apporté par les détails liés à la commodité matérielle, comme le décrit précisément Hippolyte-Aldolphe Taine :

« Mais vous auriez plaisir à voir dans la moindre rue d'Amsterdam la plus humble boutique, ses tonneaux bruns, son comptoir immaculé, ses escabeaux essuyés, chaque chose à sa place, l'étroit espace si bien utilisé. […] Il faut voir le confortable des appartements, surtout dans les maisons bourgeoises tapis, toiles cirées pour les parquets, cheminées économiques et chaudes de fer ou de faïence, triples rideaux aux fenêtres, vitres claires aux grands luisants noirs, vases de fleurs roses et de plantes vertes, quantité de brimborions qui indiquent les goûts sédentaires et rendent agréable la vie au logis, miroirs disposés pour réfléchir les passants et l'aspect changeant de la rue. Chaque détail montre un inconvénient auquel on a paré, un besoin qu'on a satisfait, un agrément qu'on s'est ménagé, un soin qu'on a pris ; bref, le règne universel de l'activité prévoyante et du bien-être minutieux. »

Hippolyte-Adolphe, TAINE, Philosophie de l’art, Paris, Hachette, 1909, (13e édition), p. 259-260.

Ainsi, nous comprenons la notion de « confort » comme étant un ensemble d’aménagements conçus minutieusement dans le but de créer un sentiment de bien-être, élément essentiel de la notion, pour les usagers d’un lieu.

2. De l’anglais au français

Le mot provient de l’anglais « comfort » et peut se traduire par « confort » ou « réconfort ». Il a été très utilisé pour désigner le confort du luxe anglais, notamment lors de son essor au début du XIXe siècle, afin de se distinguer du luxe « superflu ». C’est ce double sens que l’on retrouve par exemple dans les écrits d’Édouard Mercier :

« Ce que l’on désigne si souvent par le mot anglais de « comfort » se distingue du faste en ce qu’il ne fait entrer ni les calculs de la vanité, ni les inspirations de l’orgueil, ni la fièvre du vice dans ses moyens de satisfaction. Ce serait une inconséquence de confondre le jour avec la nuit, la modération avec le vice, la sensualité avec le désir légitime de satisfaire un besoin, l’art d’exciter les passions avec celui d’adoucir l’existence. »

Édouard MERCIER, De l’influence du bien-être matériel sur la moralité des peuples modernes, Paris, J. Renouard, 1853, p. 49.

Nous comprenons donc que le terme anglais sollicite davantage une connotation morale dans le sentiment de bien-être apporté par le confort du luxe.

3. Explication du concept et problématisation

Ainsi la nuance du « comfort » anglais nous paraît porteuse d’une ambition plus étendue dans l’accès au bien-être. Ce confort se caractérise également par une volonté d'être accessible à tous. Bien qu’au-delà d’une simple nécessité et en ce sens luxueux, cet accès se veut intégré à une visée morale, là où le « confort » français n’a de sens que dans une notion de propriété individuelle, centrée sur l’individu jouissant de ces objets ou ce lieu confortable.
Cependant, cette occurrence ne réduit-elle pas le bonheur au bien-être, entraînant ainsi la réduction du désir (car dans le luxe il est question de désir) au besoin ? Cela nous semble tout à fait paradoxal quant à la nature du confort qui, en lui-même, tente de déapsser la simple nécessité.
De plus, l’approche morale induit un souci de l’usage, d’un bon usage de ces objets et lieux afin « d’adoucir l’existence » : les usagers sont donc tenus de vivre dans une certaine discipline et mesure. Cependant, le confort concerne en général la sphère privée, où les comportements sont bien différents de la sphère publique (profession, vie sociale). En effet, l’intimité du lieu de vie amène au relâchement, divertissement, perte de sérieux, plaisir, etc. Cette approche de « comfort » à l’anglaise n’est-elle pas trop moralisante pour un lieu aussi intime que chez soi, où l’on veut être soi-même, loin des conventions sociales ?

Alex LA SELVE, Licence 3 « Design, Arts, Médias », Paris 1-Panthéon-Sorbonne, 2021-2022.