1. Définition

Le Larousse définit ainsi le symbole :

« Signe figuratif, être animé ou chose, qui représente un concept, qui en est l'image, l'attribut, l'emblème : le drapeau, symbole de la partie. »

https://www.larousse.fr/dictionnaires/francais/symbole/76051

Si la définition du Larousse est vaste, le symbole demeure un outil particulièrement prisé par les designers pour faire passer des messages à l'usager. Ces quelques citations d'un ouvrage sur le symbole peuvent préciser l'usage du symbole dans le champ du design.

« Littré confirmait déjà que le symbole appartenait à la catégorie des signes, dans la mesure où il est porteur d'une signification. »

Baudouin DECHARNEUX et Luc NEFONTAINE, Le symbole, Paris, Éditions Presses Universitaires de France, Collection Que sais-je, 2014, p. 10.

« Ceci posé, il faut éviter de considérer que le domaine du symbole est celui de l'absence et de la non-perception, car un des registres possibles du symbole est précisément la présence signifiée et la perception d'une réalité qui est là et qui se laisse voir ou entendre. »

Baudouin DECHARNEUX et Luc NEFONTAINE, Le symbole, Paris, Éditions Presses Universitaires de France, Collection Que sais-je, 2014, p. 114.

« On prête volontiers au symbole le pouvoir de rassembler les Hommes autour d'images fortes et signifiantes. »

Baudouin DECHARNEUX et Luc NEFONTAINE, Le symbole, Paris, Éditions Presses Universitaires de France, Collection Que sais-je, 2014, p. 114.

Ces citations laissent entendre que le symbole, dans le champ du design, est un signe perceptible qui a pour but de renvoyer à une image commune au plus grand nombre.

2. De l'anglais au français

De façon générale, en anglais, le « symbol » désigne une image visuelle ou un signe représentant une idée. Il garde la même signification que la traduction française « symbole ». C'est ce qui ressort de l'occurrence suivante :

« A symbol is a visual image or sign representing an idea -- a deeper indicator of universal truth. »

Miranda Bruce Mitford, Signs and Symbols, Dorling Kindersley Limited, 2019, p. 6.

Pour préciser le sens du terme dans le champ du design, on peut se référer à la version originale du livre L'art du designer1 écrit par Paul Rand : A designer's art2. Sa définition s'affine par l'évocation de son caractère universel, autrement dit sa capacité à être compréhensible par le plus grand nombre, d'une part, et part sa mutabilité formelle. Comme l'écrit Paul Rand :

« A symbol may be depicted in an abstract shape, a geometric figure, a photograph, an illustration, a letter of the alphabet or a numeral."

Paul RAND, A Designer's Art, New-York, Princeton Architectural Press, 2016, p. 7.

3. Explication du concept

Le symbole, qui représente ou suggère une chose grâce à une relation ou une association, a une efficacité établie depuis longtemps. La croix, symbole de la chrétienté en est le parfait exemple. Le designer graphique, pour créer un design porteur de sens et de qualité, doit trouver un moyen de communiquer avec l'usager pour le convaincre ou l'informer au mieux. Le symbole apparaît alors comme la solution qui retranscrirait une image universellement compréhensible, pouvant traduire des idées abstraites en formes concrètes. Paul Rand est convaincu que le pouvoir du design tient dans sa capacité à être un langage universel, qui passe par la simplicité et la géométrie de ses formes. Il écrit dans son ouvrage L'art du designer3, que « Le symbole est donc la langue commune entre artiste et spectateur4 ». En effet, celui-ci permettrait de transmettre une idée à travers une représentation graphique qui évoque un message commun à tous les usagers. Le designer dispose donc du symbole pour former un moyen de communication le plus universel possible.
Souvent associé à une simplification, le symbole ne peut être y être réduit. Il est vrai que le langage universel tient son efficacité de la simplicité, moyen le plus efficient pour traduire une idée. Pour autant, cela n'implique pas que le symbole lui-même soit nécessairement un élément simple. Paul Rand écrit dans le même ouvrage : « Au fond, un symbole n'est pas défini par ce à quoi il ressemble mais par ce qu'il produit [^5 ]». En d'autres termes, le symbole peut prendre n'importe quelle forme tant qu'il parvient à transmettre universellement l'idée du designer.

4. Problématisation

Malgré l'efficacité établie du symbole dans le design, son critère d'universalité soulève un premier problème. En effet, le rôle du designer formulé par Paul Rand se caractérise avant tout par son originalité pour créer des propositions inattendues. Paradoxalement, le symbole doit l'aider à former un langage le plus commun possible. En utilisant le symbole, le designer peut tomber dans le cliché et l'illustration conventionnelle. Il doit donc réussir à l'intégrer comme entité visuelle remplissant avec sa forme une fonction spécifique cohérente, tout en étant original. L'usager ne doit pas avoir l'impression de voir des banalités, au risque de devenir indifférent. Mais comment le designer peut-il proposer un design efficace si celui-ci doit associer deux notions qui s'opposent, l'universel et l'original ?

De plus, Paul Rand qualifie le symbole d'« outil potentiellement malléable 5 », dans le sens où celui-ci peut avoir différentes interprétations. En effet, la traduction du symbole peut varier en fonction de son contexte et des propres connotations du spectateur. Par exemple, Paul Rand écrit « Un cercle rouge pourrait être interprété comme le signe du soleil, le drapeau japonais, un signe stop, une piste de patinage ou une marque de café bien particulière6... » Un deuxième risque s'ajoute alors quant à l'utilisation du symbole dans le design, qui peut aller jusqu'à produire des contre-sens. Le designer doit donc parvenir à manier correctement la disposition et l'association du symbole pour éviter l'ambiguïté et réussir à se faire comprendre auprès d'un vaste public. Il doit également se dégager de ses propres connotations pour tendre vers l'universalité. L'usage du symbole se rapprocherait de la conception du design de Henry Van De Velde, qui avait pour ambition de « créer un art universel, obéissant de manière rationnelle à certains préceptes immuables 7 ». En effet, le symbole nécessite la conception rationnelle et la forme adéquate afin d'être le plus conforme aux usagers et de délivrer l'idée du designer. Il s'inscrit donc comme une solution à une problématique centrale du design, celle de la recherche d'universalité pour aller vers l'expression du bien commun, trait principal du design humaniste.

Agathe_Labardant_Illustration

Figure 1. L'ambiguïté du symbole, Agathe LABARDANT

Agathe LABARDANT, Licence 3 « Design, Arts, Médias », Paris 1-Panthéon-Sorbonne, 2021-2022.


  1. RAND Paul, L'art du designer, Paris, éditions B42, 2021. 

  2. RAND, Paul, A Designer's Art, Princeton Architectural Press, New-York, USA, 2016. 

  3. RAND Paul, L'art du designer, Paris, éditions B42, 2021. 

  4. RAND Paul, L'art du designer, op.cit, , p. 7. 

  5. Ibid. 

  6. RAND Paul, L'art du designer, op. cit., p. 10. 

  7. Alexandre Kostka, « Un Don Quichotte contre la Laideur : Henry Van de Velde », Germanica, 37, 2005, p. 53.