1. Définition
D’après le Le Robert, la notion de « geste », correspond à un « mouvement du corps (surtout des bras, des mains, de la tête), révélant un état d’esprit ou visant à exprimer, à exécuter quelque chose. »
https://dictionnaire.lerobert.com/definition/geste
Dès lors, cette définition peut être illustrée par deux exemples. Le premier provenant de l’ouvrage Dessiner le Design1, et le second de l’essai philosophique de Michel Guérin2.
« Les techniques numériques permettent de réduire au maximum les intermédiaires entre le geste et l’objet, entre l’idée et sa réalisation. »
Constance, RUBINI, Dessiner le Design, Paris, Les Arts Décoratifs, 2009, p.126.
« Celui à qui la parole, essentiellement ou incidemment, fait défaut a recourt au geste pour être compris. »
Michel, GUÉRIN, Philosophie du geste : essai philosophique, Actes Sud Littérature, Paris, 1995, p.09.
Nous admettons ainsi que le « geste » est un médium nécessaire à la création et à la réalisation de quelque chose dans le champ du design, tout comme à l’expression tous champs confondus. Mais il reste à comprendre qu’il implique le corps en son entièreté.
2. Du français à d’autres langues
Le terme « geste » ne présente pas de difficulté de traduction, comme en témoignent les termes de gesture » pour l’anglais, ou « gesto » pour l’italien et l’espagnol. Ce qui est en jeu dans la notion, c’est l’implication du corps dans le geste, de tout le corps, comme le soutient Constance Rubini dans Dessiner le Design, et comme l’énonce aussi Barbara Pasquinelli, dans Le Geste et l’Expression :
« In the image, the gesture is not only accomplished with the hands, but with all the attitudes and mouvements of the body3. »
Barbara, PASQUINELLI, Le Geste et l’Expression, Hazan, Edition Anglaise, 2006, p. 384.
Cette notion révèle donc l’implication du corps dans le design alors même que cette discipline de projet est souvent ramenée à la place que l’esprit (l’intention) y tient.
3. Explication et problématisation
Le terme « geste », dans l’ouvrage de Constance Rubini, n’est autre que la traduction d’une pensée mentale par la main. Il est perçu comme le moyen par lequel les idées qui naissent dans l’esprit sont retranscrites. Il est en quelque sorte le medium entre le mental et la conception. Que le geste tende vers une finalité numérique ou plus traditionnelle, il reste l’intermédiaire premier.
Dans l’ouvrage Dessiner le Design, c’est par le geste de la main qu’est matérialisée l’image mentale d’un designer en dessin. Le geste est compris comme un intermédiaire entre l’idée qui naît dans l’esprit du créateur et l’application de cette même idée sur un carnet de croquis. Un éloge du geste de la main, comme symbole de liaison entre le psychique et le physique, c’est-à-dire la matérialisation d’un objet.
C’est en outre par la gestuelle que s’impose la réalité du style, des formes, des contours de l’objet pensé. C’est aux travers de cela que la pensée devient réalité. Nous pouvons relier cette compréhension du geste avec la Théorie de l’Invention de Paul Souriau4, qui met en avant la capacité de l’esprit à retranscrire l’expérience sensible, pour imaginer les objets, empruntés à la réalité. Tout se crée sur la base d’expériences, de sensations, d’émotions, propres à la perception du designer, et retranscrit par le geste.
Le geste est donc majeur dans le processus de création du design, malgré une approche numérique qui devient proéminente, comme nous le fait remarquer Constance Rubini5 dans cet ouvrage.
Émilie KLOSS, Master 1 « Design, Arts, Médias, Paris 1 Panthéon-Sorbonne 2021-2022
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Constance, RUBINI, Dessiner le Design, Paris, Les Arts Décoratifs, 2009, p.126. ↩
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Michel, GUÉRIN, Philosophie du geste : essai philosophique, Arles, Actes Sud, 1995, p. 9. ↩
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« Dans l’image, le geste n’est pas seulement accompli avec les mains, mais avec toutes les attitudes et mouvements du corps. » Traduit par mes soins. ↩
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Paul, SOURIAU, Théorie de l’Invention, Paris, Librairie Hachette et Cie, BnF, 1881. ↩