1. Définition

La notion de « code de création », forgée sur le grec « poíēsis », venant du verbe « poiein » qui signifie «faire », « créer », renvoie à une conception de la programmation en tant qu’acte poétique.

Le concept est tiré du livre collectif Maeda John, Code de création. Si le concept n’est en lui-même pas nommé dans le livre (en dehors du titre) les articles qu’il compile en éclaircissent toutefois le sens, comme l’illustrent les trois citations suivantes:

« Un programme est un ensemble très précis d’instructions qui dit à l'ordinateur exactement ce qu’il doit faire ».

REAS, Casey, « Le langage des ordinateurs », dans MAEDA, John, Code de création, Paris, Thames & Hudson, 2004, p. 44.

« Le logiciel est un enregistrement vivant d’une pensée que l’on a eu sur le monde tel qu’il devrait être. »

LEVIN, Golan, « L’ordinateur est-il un outil ? », dans MAEDA, John, Code de création, Paris, Thames & Hudson, 2004, p. 141.

« Passion addictive pour la construction et fabrication d’objets ».

FRY, Benjamin, « For 1 = 0 », dans MAEDA, John, Code de création, Paris, Thames & Hudson, 2004, p. 226.

On constate qu’il est donc question de la programmation en tant qu’ensemble d’instructions, c’est-à-dire en tant que code. Celui-ci est l’intermédiaire par lequel nous communiquons avec nos ordinateurs, c’est un acte de création qui porte la pensée à l’instant T de son auteur sur le monde.

2. De l’anglais au français.

Le concept de « code de création » est traduit de l’anglais « Creative Code » par Jean-François Allain. Il s’agit d’un choix un choix de traduction non littéral, qui témoigne de l’effort de mettre en avant la création comme une action, un processus plutôt qu’un simple adjectif. Cela réaffirme la conception de la programmation comme une action fondamentale de création plutôt que de l’assimiler à une activité neutre occasionnellement créative, fidèle en cela à la conception qu’en a Maeda.

3. Explication du concept

Le concept de « code de création » a pour but de qualifier ce qu’est la programmation en nature et en fonction. En nature, c’est une suite d'instructions comparables au langage, bien que lacunaires. En fonction, c’est l'intermédiaire par lequel nous interagissons avec nos ordinateurs ; intermédiaire qui permet de convertir des idées en codes compréhensibles par celui-ci. Il est malléable et peut donc présenter un style et une personnalité propres, qui lui auront été insufflés par son programmeur à partir de règles et d'exceptions.

À partir de cette notion, se pose la question du rapport entre l’utilisateur et ses outils. Dans un contexte de complexification des outils et d'accélération de leur obsolescence, le code de création apparaît comme une solution, une approche critique privilégiant la construction à l’achat. C’est ce que montrent ces quelques lignes de John Maeda :

« Je n’ai jamais aimé le principe des magasins de fournitures pour artistes, cela me donne l’impression que l’on ne peut pas pratiquer d’activité artistique si l’on n’a pas d’abord fait ses courses. »

MAEDA, John, « Recommencement », dans MAEDA, John, Code de création, Paris, Thames & Hudson, 2004, p. 3.

4. Problématisation

Si le concept de « Code de Création » apparaît comme prometteur, on peut cependant se désoler du manque de succès que le concept a connu. Une des limites qu’il a rencontrées est de ne pas avoir été repris au-delà du livre dont il est tiré, y compris par son propre auteur. Il serait tentant de faire un parallèle avec la disparition du terme « Esthétique Industrielle » de Jacques Viénot. Cependant la comparaison ne tient pas car, si l’Esthétique Industrielle a su se maintenir un temps, c’est notamment parce qu’elle a su se doter d’une charte1. Au contraire, le concept de Code de Création n’a pas su persister en l’absence de structure ou de désir pour le promouvoir.

5. Illustration

Figure 1. Épées de Damoclès du designer, Clem SOUCHU

Clem SOUCHU, Master 1 « Design, Arts, Médias », Paris 1 Panthéon-Sorbonne, 2021-2022.


  1. VIÉNOT, Jacques , « La Charte de l'esthétique industrielle », dans Revue Esthétique industrielle, Paris : éd de Clermont, 1952.