1. Définition

La « société de consommation » est un avant tout une « société », terme que le Larousse définit par « Ensemble d'êtres humains vivant en groupe organisé ».

On pourrait donc comprendre la « société de consommation », comme un groupe organisé d’humains ayant comme but la consommation de biens. Mais il faut aller plus loin, il doit y avoir une notion de surconsommation, une absence de raison et d’éthique dans la notion. Jean Baudrillard expose cela dans La Société de consommation, ouvrage de 1970, en insistant sur l’idée d’abondance. Il écrit en effet :

« Il y a […] une différence absolue entre le gaspillage de nos sociétés d’abondance, gaspillage qui est une nuisance intégrée au système économique, qui est un gaspillage fonctionnel, non producteur de valeur collective, et la prodigalité destructive qu’ont pratiquée toutes les sociétés dites de pénurie, dans leurs fêtes et leurs sacrifices, gaspillage par excès, où la destruction des biens était source de valeurs symboliques collectives. Jeter les automobiles démodées à la casse ou brûler le café dans les locomotives n’a rien d’une fête : c’est une destruction systématique, délibérée, à des fins stratégiques […]1».

La société de consommation est donc étroitement liée à un modèle de gaspillage, de sur-jouissance et de gourmandise, loin des premières nécessitées et de la sobriété.

2. De l’anglais au français

Le concept de « Société de consommation » émerge aux États-Unis dans les textes de John Kenneth Galbraith, tel que « L'ère de l'opulence2». Il y expose le changement de la société américaine à la fin de la Seconde Guerre Mondiale, quand les secteurs privés s’enrichissent alors que le secteur public reste pauvre. Le titre anglais est Affluent Society, si nous traduisons de façon littérale, affluent signifierait riche, qui a de l’argent en grande quantité, mais le mot s’applique aussi à l’eau et désigne un cours d’eau non contraint de grande taille. On peut facilement comprendre le lien avec la consommation. John Kenneth Galbraith, par ce nom, décrit une société ou les échanges sont de grande taille et en grande quantité. C’est ici le début de la société d’abondance que cerne Baudrillard.

3. Explication du concept

« La société de consommation se définit par cette production artificielle des biens que les gens ne désirent pas vraiment mais qu'on leur apprend à désirer3 » : c’est ainsi que Jean-Marie Domenach définit quant à lui la société de consommation. « Leur apprendre à désirer » renvoie au travail du publicitaire. Jean-Luc Coudray décrit cette société de consommation, la pointant du doigt en critiquant ce que les objets représentent. L’auteur émet l’hypothèse que la société de consommation nous dépossède de toute interaction avec la nature. Il écrit en effet :

«  l'ordinateur nous relie au réseau internet, le téléviseur au système des informations officielles, le robinet à la structure de distribution de l'eau, le réveil à l'heure étatique […] le fonctionnement informatique du réveil procède d'une logique mathématique et non d'une causalité physique.4 »

Par ces exemples on peut voir que nous sommes tous reliés par des objets de notre quotidien. Liés en société et ce sont ces mêmes institutions qui nous lient à une société de consommation commune.

4. Problématisation

La « société de consommation » peut toutefois s’interpréter différemment. « Consommation » peut aussi renvoyer aux « consommables », aux ressources peu durables. La société de consommation crée à la fois le concept de consommateur et de produit. Ce produit consommé consomme des ressources lors de sa production ainsi que lors de sa distribution et à l’achat. S’ébauche alors un cycle de la production à l’achat puis à la consommation proprement dite, qui nous renvoie vers un nouvel achat dû a notre société axée sur l’obsolescence. Vivre dans une société de consommation aussi prolifique que la nôtre nous envoie vers une fin inévitable, la consommation de toutes les ressources de la terre. C’est pourquoi il est primordial de construire un design circulaire, éthique et durable. De plus en plus nous voyons des projets de design naître avec un objectif de durabilité pour changer nos comportements et notre façon de consommer. Il faut se tourner vers des alternatives low-tech avec des indices de réparabilité très forts selon Jean-Luc Coudray qui, dans son ouvrage, guide le lecteur vers des habitudes plus durables. Il lui conseille de « Cesser d'acheter chaque fois que c'est possible, car le renoncement, la réparation, l'entretien, l'emprunt de l'objet au voisin, l'échange, le troc, c'est lutter contre le vacarme de la propagande des objets, donner son suffrage à un autre monde possible5. »

Max ROOS, Master 1 « Design, Arts, Médias », Paris 1 Panthéon-Sorbonne, 2022-2023.


  1. BAUDRILLARD, Jean, La Société de consommation. Ses mythes ses structures, SGPP, « Le point de la question », Paris, 1970 

  2. GALBRAITH , John Kenneth, L'ère de l'opulence (The Affluent Society). Traduit de l'anglais par Andrée R. Picard. Paris, Calmann-Lévy, coll. Liberté de l’esprit, 1961. 

  3. DOMENACH, Jean-Marie, Tribune libre, France Région 3, extrait vidéo en ligne, https://mediaclip.ina.fr/fr/i21013860-la-societe-de-consommation-selon-jean-marie-domenach.html, Consulté le 8/11/2022. 

  4. COUDRAY, Jean-Luc, La propagande des objets familiers, Caudebec-en-Caux, La Déviation, 2020, p. 165. 

  5. COUDRAY, Jean-Luc, La propagande des objets familiers, op. cit., p. 189.