1. Définition
Michel Beaudouin-Lafon, docteur en informatique à l'université Paris-Sud 11, définit l’ « Interaction homme-machine (IHM) » comme un :
« Domaine consacré à l'étude, la conception, le développement, l'évaluation de systèmes informatiques interactifs mais aussi à l'impact organisationnel, sociétal et éthique des technologies de l'information1. »
Michel BEAUDOIN-LAFON, « L'interaction homme-machine», CNRS - Cahiers IMABIO, Mars 1992, p. 1.
2. De la langue d’origine au français
Le terme « Interaction Homme-machine (IHM) » est traduit de l’anglais Human–computer interaction (HCI). Dans le passage de l’anglais au français, on note le passage du terme spécifique computer (ordinateur) au terme plus générique de « machine ». On peut y voir la continuation de l’opposition entre les écoles anglophone et francophone dans le domaine informatique. La première s’est structurée autour du terme « computer science » (littéralement en français « science ordinatique »), alors que la seconde s’est structurée autour de « l’informatique », mot constitué d’« information » et du suffixe -ique, pouvant être alors lu comme «relatif à l'information». On peut noter que le terme français a été forgé par l'informaticien Philippe Dreyfuss, et a été validé lors d'un conseil des ministres par l’ancien chef de l’État français Charles De Gaulle, qui trancha entre informatique et ordinatique.
3. Explication du concept
Le terme prend tout son sens à la lecture du texte de Maeda, John, Code de création2, dans sa capacité à représenter la diversité de nos rapports aux ordinateurs, ce qui est illustré par les 4 citations suivantes :
« Les ordinateurs partagent avec les hommes la même incapacité à assimiler cette notion (l’infini) ».
MAEDA, John, « Espace » dans MAEDA, John, Code de création, Paris, Thames & Hudson, 2004, p. 18.
« Quelle leçon tirer de tout cela ? Nous devons remercier la technologie moderne. Donc, merci ordinateur ».
MAEDA, John « Vivre » dans MAEDA, John, Code de création, Paris, Thames & Hudson, 2004, p. 50.
« L’ordinateur semblé voué à fusionner avec notre esprit et notre corps » Levin, Golan « L’ordinateur est-il un outil ? ».
MAEDA, John, Code de création, Paris, Thames & Hudson, 2004, p. 141.
« C’est un outil car je le traite comme tel. […] comme un pinceau ou un crayon » Davis, Joshua, « Machine à abstraction dynamique ».
MAEDA, John, Code de création, Paris, Thames & Hudson, 2004, p. 142.
Ici, on peut voir trois approches différentes de nos rapports avec les ordinateurs, illustrant la diversité de liens évoquée plus tôt. Maeda place d’abord l’humain et l’ordinateur dans un rapport d’altérité, en dotant ce dernier d’une capacité de compréhension. En développant ce point, il ancre ensuite nos interactions avec les ordinateurs dans un rapport affectif et émotionnel, ici un rapport de gratitude. Golan Levin, quant à lui, décrit un rapport évolutif et fusionnel qu’aurait la programmation avec l’homme. Enfin, en opposition, Joshua Davis considère ses interactions avec un ordinateur comme un simple rapport d’utilisateur envers un outil.
4. Problématisation
Le concept d’Interaction Homme-Machine met donc en lumière l’aspect très limitatif des usages courants que nous avons de nos ordinateurs, comparé à la diversité qu’ils pourraient offrir, voire offrent déjà. La limite qu’on trouve cependant au concept est qu’il ne tranche pas sur l’usage des ordinateurs. Au fond, l’idée serait que l’ordinateur peut à peu près tout faire, ou plus précisément tout ce que l’utilisateur désire lui faire faire. À cette critique, on peut répondre que l’enjeu derrière le code de création n’est pas de penser la finalité atteinte grâce à l’ordinateur ou de l’optimiser, mais de repenser l’interaction avec l’ordinateur elle-même.
5. Illustration
Figure 1. Les trois Interactions Humains Machines, Clem SOUCHU
Clem SOUCHU, Master 1 « Design, Arts, Médias », Paris 1 Panthéon-Sorbonne, 2021-2022.
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https://www.lri.fr/~mbl/pdf/mbl-encycl-06a.pdf, consulté le 03/01/2022. ↩
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MAEDA, John, Code de création, Paris, Thames & Hudson, 2004. ↩