1. Définition 

D’après Le Robert, la notion de dessin correspond à la « Représentation ou suggestion des objets sur une surface, à l’aide de moyens graphiques. »
https://dictionnaire.lerobert.com/definition/dessin

Mais, à côté de cette définition technique, subsiste une compréhension qui vise à indiquer la place du dessin au regard des autres arts. L’on trouve par exemple sous la plume d’Emmanuel KANT la définition suivante :

« Dans la peinture, dans la sculpture et même dans tous les arts plastiques, en architecture, dans l’art des jardins, dans la mesure où ce sont là des beaux-arts, le dessin est l’élément essentiel. »

KANT, Emmanuel, « L’esthétique du dessin », Critique de la Faculté de Juger, 1790 ; Paris, Flammarion, Collection GF, Trad. Alain Renault, 2015.

Ainsi, la notion de « dessin » révèle que, peu importe l’art pratiqué et les moyens employés, cette pratique est « essentielle », car élémentaire. Il en est de même pour le bon fonctionnement d’un projet dans le champ du design.

2. De l’italien au français 

Le mot d’origine provient de l’italien « Disegno » signifiant à la fois le dessin et le dessein : c’est en ce double sens qu’il concerne le projet en design. C’est ce double sens que l’on trouve par exemple chez Giorgio Vasari, quand il écrit :

« Da questa apprensione (cognizione) si forma un concetto, una ragione (giudizio), generata nella mente dall’aggtto, la cui espressione manuale è chiamata disegno1. »

Vasari, Giorgio, Le Vite de’ più eccellenti pittori, scultori et architettori, Firenze, Edité par G. C. Sansoni, Da N. Tarchiani, 1915, p. 1912.

Le double champ sémantique est désormais disjoint en français, comme ils le sont en anglais et en allemand, mais ils se retrouvent dans ce que l’on nomme (en angalis et dans d’autres langues) « design ».

3. Explications et problématisation 

Le dessin renvoie, en un sens, à une façon de communiquer, de prototyper, ou tout simplement de réfléchir, est une aide primordiale à l’équilibre entre la pensée et la forme chez le designer. En effet par le dessin, outil de travail primaire, naît de l’imagination du designer la future matérialisation d’un objet. Souvent perçu comme des notes, aux inspirations d’art impliqué2 et au sens esthétique très minime pour certains designers, il est la représentation graphique d’une conception née dans l’esprit. Relayé davantage au second plan depuis l’arrivée du numérique, car étant insignifiant et utilisé comme simple explication pour les personnes travaillant avec le designer, cette expression de l’esprit humain est essentielle à la compréhension d’un objet, pour quelqu’un d’extérieur au processus de création. En un sens, un dessin sans dessein est-il encore du design ?

Émilie KLOSS, Master 1 « Design, Arts, Médias », 2021-2022


  1. « De cette appréhension (cognizione) se forme un concept (concetto), une raison (giudizio), engendrée dans l’esprit (mente) par l’objet, dont l’expression manuelle se nomme dessin (disegno). » : c’est ce que donne la traduction française dans André CHASTEL (dir.), Les vies des meilleurs peintres, sculpteurs et architectes, 1981, t.1, p. 149. Mais nous pourrions proposer, pour garder le double sens : « De cette appréhension (cognizione) se forme un concept (concetto), une raison (giudizio), engendrée dans l’esprit (mente) par l’objet, dont l’expression manuelle se nomme dessin/dessein (disegno). » 

  2. Cf. Jacques VIÉNOT, Charte de l’esthétique industrielle, Loi n° 13 : « Loi des arts impliqués : L’esthétique industrielle implique une intégration de la pensée artistique dans la structure de l’ouvrage considéré. Loin du décor plus ou moins arbitraire ou artificiel ou surajouté des arts appliqués, les arts qui concourent à l’esthétique industrielle peuvent singulièrement être dits impliqués dans le modèle à concevoir, faisant corps avec la technique et se confondant avec elle. »