1. Définition

D’après le CNRTL, le genre est un « ensemble d’êtres ou d’objets ayant la même origine ou liés par la similitude d’un ou de plusieurs caractères. »

https://www.cnrtl.fr/definition/genre, Consulté le 29/10/2021

Le genre se rapporte de façon plus spécifique à la construction socioculturelle des rôles masculins, féminins et autres se définissant en dehors de cette binarité. Dans Le souci des autres, éthique et politique du care1 sous la direction de Sandra Laugier, le « genre » désigne une construction socioculturelle de rôles souvent dits masculins ou féminins. Cette notion est abordée par les différentes autrices de Le souci des autres, éthique et politique du care par le prisme du féminisme et la volonté de supprimer la binarité masculin/féminin que l’on lui accorde trop souvent, afin de voir au-delà.

2. De l’anglais au français

En anglais, le sens du terme « gender » reste identique à celui utilisé en français dans ce contexte. Cependant, le terme gender est beaucoup plus spécifique que le terme genre en français. D’après Tracey A. Revenson, la notion de genre est intrinsèquement liée à celle du care :

« It is short sighted to study caregiving in the illness context without considering gender. Historically, caring for ill family members was an expected role for women within the privacy of the family. Caregiving is still commonly perceived to be a part of “women’s work” in societies throughout the world. [...] However, it is not just a perception: 60% of caregivers are women2. »

REVENSON Tracey A., «Gender and Caregiving: The Costs of Caregiving for Women», dans REVENSON Tracey A. (dir.), Caregiving in the Illness Context, Londres, éd. Palgrave Pivot, 2016, p. 49.

Bien que longtemps confondu avec le terme « sexe », le terme « genre » (en anglais comme en français) est maintenant appliqué à deux termes composés étroitement liés : l’identité de genre fait référence au sentiment interne d’une personne d’être un homme, une femme, une combinaison d’homme et de femme ou ni homme ni femme; l’expression du genre fait référence aux manifestations physiques et comportementales de l’identité de genre d’une personne3.

3. Explication du concept

D’après Lawrence Kohlberg, il y aurait deux types de préoccupation morale liée au genre, à savoir ce « qui est masculin est important, profond et public ; ce qui est féminin est étriqué, spécifique et insignifiant4. » Cette vision simpliste de la division entre le public et le privé, et ainsi l’association du privé au féminin et de sa dévalorisation, a vite été rejetée par le mouvement intellectuel féministe. Selon Marilyn Friedman, « les genres sont “moralisés” de manières différenciatrices5 », et il en résulte une dichotomie entre les genres par une division du travail moral6. Les stéréotypes de genre relatifs au féminin tournent autour de la préoccupation pour le bien-être d’autrui, les caractères liés au soin et à l’épanouissement d’autrui, la sensibilité interpersonnelle, un comportement empreint de douceur. Les stéréotypes de genre concernant le masculin se concentrent quant à eux sur des tendances à s’affirmer et à se contrôler : soit l’affirmation de soi, la domination par la force, l’indépendance vis-à-vis d’autrui. Tant que la pensée morale féminine sera considérée comme différente et plus singulière que la pensée morale dominante associée aux hommes, elle sera toujours traitée comme secondaire. Mais si nous favorisons le développement pour tous de deux morales égales et que nous laissons le soin aux individus de décider quand appliquer l’une ou l’autre, cela revient d’une part à ignorer les origines des différences de genre actuelles, et d’autre part, cela nous ferait retomber dans une vision rigide des genres. Marie-Valentine Gallon, UX designer, s’est penchée sur la question du genre à travers le design et a préparé un template de questions à l’usage des designers, afin de « se libérer du principe d’identification des utilisateurs à un sexe ou à un genre7. » Saul Pandelakis, enseignant chercheur en design et auteur, s’est également penché sur le sujet du genre, notamment à travers des publications et conférences sur le thème du « Queer[ed] Design8 ». C’est donc à nous en tant que designer qu’appartient le choix de définir, ou non, une identification genrée aux projets de design, et de savoir si celle-ci sera pertinente dans son aboutissement final au vu des contraintes demandées préalablement au projet.

Camille STOLPNER, Master 2 « Design, Arts, Médias », Paris 1 Panthéon-Sorbonne, 2021-2022.


  1. LAUGIER, Sandra (dir.), Le souci des autres, éthique et politique du care, Paris, éd. EHESS, coll. « Raisons pratiques », 2011. 

  2. « Il est peu judicieux d’étudier la prestation de soins dans le contexte de la maladie sans tenir compte du sexe. Historiquement, s’occuper des membres malades de la famille était un rôle attendu des femmes dans l’intimité de la famille. La prestation de soins est encore communément perçue comme faisant partie du « travail des femmes » dans les sociétés du monde entier. [...] Cependant, il ne s’agit pas seulement d’une perception : 60 % des aidants sont des femmes.»
    Traduction personnelle. 

  3. https://www.merriam-webster.com/dictionary/gender#usage-1, Consulté le 14/12/2021. Traduction personnelle. 

  4. LAUGIER, Sandra (dir.), Le souci des autres, éthique et politique du care, Paris, éd. EHESS, coll. « Raisons pratiques », 2011, p. 59 

  5. Ibid., p. 80 

  6. Id. 

  7. https://marievalentine.fr/sexe-genre-design/ Consulté le 12/12/2021 

  8. http://saulpandelakis.com/publications Consulté le 12/12/2021