HOLMES, Kat, Mismatch: How inclusion shapes design, Cambridge, Massachusetts, The MIT Press, Series: Simplicity: design, technology, business, life, 2018
HOLMES, Kat, Mismatch : Comment l’inclusion façonne le design (proposition de traduction)

La question centrale que Kat Holmes à son lecteur est la suivante : si le design est la source de l'exclusion, peut-il aussi en être le remède ? Dans Mismatch: How inclusion shapes design, l’auteur explique comment des décisions de conception, prises sur la base de préjugés ou d'irréflexion, peuvent conduire à l'exclusion d'un grand groupe de personnes qui ne répondent pas à certains critères. Mais en même temps, il s’agit de montrer si des méthodes d'inclusion sont appliquées, le design pourrait aussi réagir en contrepoint, c'est-à-dire corriger les incohérences dans les interactions utilisateur-produit.

Pour défendre sa thèse, Kat Holmes explique que les méthodes du design inclusif, telles que la conception d'objets avec, plutôt que pour, des personnes exclues, peuvent créer des solutions qui fonctionnent et profitent à tous. Chaque fois qu'une disparité est corrigée ou qu'une décision est prise avec une pensée inclusive, de nouvelles opportunités sont créées pour que davantage de personnes se sentent bien chez elles, et intégrées dans la société. L'inclusion est créée lorsque les principes de conception inclusifs sont appliqués contre une habitude d'exclusion.

Pour étayer son propos, Holmes propose tout d’abord un cadre de cycle pour examiner comment nous maintenons des conceptions non conformes et comment progresser vers l'inclusion. Chacun des cinq éléments de ce cycle est étroitement lié aux autres. Le premier d'entre eux est « Why we make1 » ­— pourquoi nous faisons, concevons quelque chose. Il s'agit des intentions du designer ou de celui qui est en position de résoudre le problème. Quelles sont les incitations à prendre une décision, pourquoi et comment sont-elles mises en œuvre dans la création d'un produit donné ? C’est ce qu’il s’agit de comprendre ici. Deuxièmement, « Who makes it2 » — « qui livre la solution ». Réponse : c’est le designer, le décideur responsable de sa mise en œuvre réussie et de son succès. Kat Holmes déclare que, dans une certaine mesure, quiconque a déjà été capable de résoudre un problème est un designer. L'idée ici est d'impliquer le plus de personnes possible dans le processus de conception, qu'elles soient professionnelles ou non, et l'accent est mis sur la diversité des idées que chacune apporte à travers son expérience. Ensuite vient « How it’s made » 3 — « comment nous faisons ». Sont alors évoquées les méthodes et les ressources qui sont mises en œuvre par les designers. Il est important de considérer le contexte historique d'une décision et comment elle a influencé ou influencera la conception à l'avenir. Lorsque la question « Who uses it4 » — qui l'utilise — est posée, il faut également se demander quelles conclusions les designers tirent de l’observation des gens. Il s'agit souvent de divisions incorrectes en termes de sexe, de race, d’ethnicité, d'âge, etc. Et lorsque les gens sont traités comme un groupe monolithique, ces préjugés peuvent aussi entraîner des conséquences erronées et offensantes. Enfin, « What we make5 » — ce que nous fabriquons— traite du produit créé et de comment il est adapté à chaque personne. Le produit qu’on choisit de créer est aussi un choix de qui pourra l'utiliser et de comment il va participer pleinement à la société. Il doit être fonctionnel, mais surtout humain.

D’après Kat Holmes, le concept qui doit se développer dans le travail est celui du « design inclusif » : l’objectif est de montrer comment ce principe s’applique aux stratégies de conception de diverses entreprises, en quoi il est extrêmement important pour l'avenir de ce domaine et surtout pour l'interaction entre le produit et l’usager. Cela s'accompagne du concept de la « diversité », qu’elle soit considérée du point de vue du recrutement, de la prise de décisions, de la présentation d'idées ou du travail avec des personnes différentes. Enfin et surtout « l'accessibilité » : le plus important dans le champ du design étant d'essayer de donner accès aux exclus.

Le travail de Kat Holmes offre une nouvelle perspective pour le développement du domaine du design. Il représente un principe de réflexion fondamental lors de la création d'un nouveau produit qui prend en compte la diversité des utilisateurs et les différents besoins de chacun d'entre eux. À l'instar de la pensée novatrice des créateurs du Bauhaus, qui ont transformé le système d'enseignement des élèves-enseignants en une communauté d’artistes/designers avant la lettre travaillant ensemble, le design inclusif vise l'idée de créer avec les gens, pas seulement pour eux. Dans le monde dans lequel nous vivons, divisé en raison de divers facteurs sociaux et économiques, le design est le moteur qui peut remettre en question ce statu quo et forcer les changements nécessaires pour contribuer à une société et un monde plus solidaires.

Veronika ANDREEVA, Licence 3 « Design, Arts, Médias », Paris 1 Panthéon-Sorbonne, 2022-2023.


  1. HOLMES, Kat, Mismatch: How inclusion shapes design, Cambridge, Massachusetts, The MIT Press, Series: Simplicity: design, technology, business, life, 2018, p. 27-41. 

  2. HOLMES, Kat, Mismatch: How inclusion shapes design, op. cit., p. 41-63. 

  3. Ibidem, p. 63-91 

  4. Ibid., p. 91-115. 

  5. Id., p. 115-131.