1. Définition

Comment définir la notion de « co-design ? » Le mot « co-design » est un mot composé qui est constitué du préfixe « co-» et du mot « design ». D’après le dictionnaire Larousse le préfixe « co » indique l'association, la participation et la simultanéité. Cela signifie que l’associer au design apporte à la notion un caractère participatif. À la lecture du mot, le « co-design » apparaît donc comme un design où plusieurs individus travaillent ensemble, au même rythme et à la même allure.

Dictionnaire Larousse, [en ligne], URL : https://www.larousse.fr/dictionnaires/francais/co-/16723#:\~:text=%EE%A0%AC%20co%2D,%3A%20coauteur%2C%20coexister%2C%20etc. , consulté le 22/11/2023.

Il s'agit d'un engagement constant des utilisateurs à chaque phase, utilisant diverses techniques de recherche et de conception pour aboutir à des produits hautement utilisables et accessibles. La définition de l'Interaction Design Foundation précise :

« Co-design is a collaborative approach where designers work together with non-designers to create solutions. Designers act as facilitators and guide the participants through the design process. Co-design aims to harness the collective wisdom and insights of everyone involved, especially the end-users, to innovate and solve problems effectively. »

Interaction Design Foundation, [en ligne], URL : https://www.interaction-design.org/literature/topics/co-design, consulté le 18/01/2024.

2. De l’anglais au français

Du passage de l'anglais au français, le terme anglais « co-design » trouve sa traduction littérale sous les appellations françaises « co-design » ou «co-conception », préservant ainsi fidèlement le sens originel. Le terme « co-design » trouve ses racines dans le domaine du design collaboratif, où plusieurs parties prenantes travaillent ensemble pour concevoir un produit, un système ou un service. Le « co-design », également connu sous le nom de «design collaboratif » ou « design participatif », est une approche visant à concevoir des expériences, des solutions et/ou des produits dans laquelle les parties prenantes telles que les employés, les partenaires, les clients et les utilisateurs finaux sont traités comme des collaborateurs égaux dans le processus de design. En d'autres termes, le « co-design » est un processus de design visant à impliquer activement et délibérément les parties prenantes pertinentes dans le processus de design afin de garantir que le résultat réponde à leurs besoins.

3. Explication du concept

L'histoire de ce mot remonte aux années 1960-1970, époque à laquelle les approches traditionnelles du design ont commencé à évoluer vers des méthodes plus participatives. Le terme « co-design » trouve son origine dans quatre traditions distinctes, émergées historiquement à travers divers contextes sociaux, géographiques et disciplinaires. La première tradition se concentre sur la construction communautaire et le consensus, avec des motivations axées sur la démocratie et la durabilité. La deuxième tradition met l'accent sur la conception démocratique dans l'architecture et la planification socio-techniques, en mettant en avant des concepts tels que la polyphonie et l'apprentissage de la créativité collective. La troisième tradition se focalise sur la coopération entre adversaires pour créer une valeur co-créée, tandis que la quatrième tradition implique la co-création entre utilisateurs et experts en conception, avec une orientation vers la citoyenneté créative et l'innovation sociale. Malgré des connexions intellectuelles, ces traditions sont considérées comme relativement indépendantes les unes des autres, témoignant de la diversité des contextes et des motivations qui ont façonné le concept de co-design. Ainsi, le terme englobe maintenant une variété de pratiques collaboratives visant à intégrer de manière créative les parties prenantes dans le processus de design1. L'idée fondamentale derrière le « co-design » est que les utilisateurs finaux, les designers, les ingénieurs et d'autres parties prenantes travaillent de concert dès le début du processus de design. Cela diffère de l'approche traditionnelle où les designers développent des solutions de manière relativement isolée avant de les présenter aux utilisateurs.

Le design collaboratif, ou ou « co-design », est donc un type de design où le travail d’équipe est mis à l’honneur. En ce sens, il n’est pas réservé qu’à celui que l’on pourrait appeler designer, mais il est ouvert aux acteurs d’autres disciplines. En co-design, le designer travaille main dans la main avec le développeur ou encore, le chargé marketing. Cette méthode de travail est mise en place pour pallier le manque de communication entre les éléments d’une même équipe, car le manque de communication donne lieu à des décalages dans les productions de chacun qui font que les résultats ne sont pas en symbiose.

L'idée est donc d’éviter le processus de création classique où chacun crée dans son coin et on présente le tout lors d’une réunion. Nous pouvons le retrouver dans des domaines tels que la conception de produits, d'interfaces utilisateur, de services, d'espaces physiques, et même de politiques publiques.

En résumé, le « co-design » doit passer par la collaboration active, l’inclusivité, l’empathie et la compréhension et la responsabilité partagée2.

4. Problématisation

Alors que le « co-design » offre une approche novatrice pour impliquer les parties prenantes dans le processus de conception, son application soulève des questions importantes liées à l'éthique, à la confidentialité, à la diversité et à d'autres considérations essentielles. En effet, le « co-design » peut également présenter des défis.

En ce sens, est-ce que les produits qui résultent du « co-design » répondront réellement aux besoins de tout utilisateur ? Comme dans tous groupes, même en voulant l'éviter, il y a des niveaux de dominance qui peuvent surgir. Certains, n’arriveront pas toujours à s'exprimer et à faire ressortir leurs idées et réflexions, il peut être difficile de concilier les opinions de chacun. De plus, les objectifs des uns peuvent ne pas être les objectifs des autres en profondeur, cela peut créer des dissonances au niveau des attentes du travail de chacun et du conformisme… 

L’esthétique étant inévitable en design car en tant qu’humains on apporte notre identité à nos réalisations, quelle place aurait-elle dans une production dans un type de design centralisé par la collaboration3 ?

L'esthétique détient donc un rôle clé dans le « co-design », et ce indépendamment du fait qu’il repose sur la collaboration et l'implication des utilisateurs. 

Dans un contexte de « co-design », cela peut se traduire par la capacité des participants à influencer l'apparence visuelle d'un produit, d'une interface utilisateur, ou d'un environnement, afin qu'il reflète leurs préférences esthétiques et leur culture, mais de qui seront les expériences qui prendront l’ascendant ?

En intégrant les utilisateurs dans le processus de conception, l'esthétique prend une dimension particulière. Les concepteurs peuvent collaborer avec les participants pour comprendre leurs goûts esthétiques, leurs préférences visuelles et créer des solutions qui sont visuellement attrayantes pour ceux qui les utiliseront.

L'esthétique est souvent liée à la culture. Dans une approche de « co-design », les concepteurs chercheront à comprendre la culture des participants pour incorporer des éléments esthétiques qui résonnent avec leur contexte culturel.

En ce sens, l’esthétique occupe une place significative dans la production de « co-design » en influençant le processus créatif, en exprimant l'identité des participants, en tenant compte des préférences culturelles et individuelles, et en contribuant à l'adoption réussie des solutions conçues collaborativement.

C’est en ce sens que Ingrid Burkett a souligné la question de ressources en disant :

«However, we also need to ensure that service users have access to the information, skills, capacities and support to participate effectively in co-designing services. Merely opening up possibilities for choice and participation will not necessarily lead to more personalized or effective services if this just means more one-size-fits all services to choose from, or if participation remains restricted to consultation ».

BURKETT, Ingrid, An Introduction to Co-design, Auckland, Knode, 2016, p.8.

Ingrid BURKETT souligne l'importance de donner aux utilisateurs de services les moyens nécessaires pour participer de manière significative à la conception des services. Elle met en avant le fait que simplement offrir des possibilités de choix et de participation ne garantit pas automatiquement des services plus personnalisés ou plus efficaces. En d'autres termes, il ne suffit pas de proposer une gamme de services standardisés parmi lesquels les utilisateurs peuvent choisir, ni de se limiter à des consultations superficielles. Pour que la participation des utilisateurs ait un impact réel, il est nécessaire de leur fournir l'accès à des informations pertinentes, de développer leurs compétences et capacités, et de leur offrir un soutien adéquat. En l'absence de ces éléments, la participation pourrait se limiter à une simple consultation, sans réelle influence sur la conception des services. Ainsi, nous sommes soumis à une mise en garde contre une approche superficielle de la participation des utilisateurs et l'importance de créer des conditions propices à une véritable implication dans la co-conception des services.

Figure 1. Co-design

Bita MALEKIAN, Tinan QUOICY LOU, Master 1 « Design, Arts, Médias », Paris 1 Panthéon-Sorbonne, 2023-2024.


  1. ZAMENOPOULOS,Theodore, ALEXIOU,Katerina, Co-design as collaborative research, Bristol, University of Bristol and the AHRC Connected Communities Programme, Connected Communities Foundation Series, 2018, p.15, [en ligne], URL :https://www.researchgate.net/publication/330259259_CO-DESIGN_AS_COLLABORATIVE_RESEARCH, consulté le 18/01/2024. 

  2. Usabilis, [en ligne], URL : design-collaboratif-codesign, consulté le 22/11/2023. 

  3. PAPANEK Victor, Design for the Real World: Human Ecology and Social Change, New York, Pantheon Books, 1971, p.3-4.