Alice Rawsthorn, « Chapitre 6. Le design est-il toujours un monde d’hommes (cis) ? »
Alice Rawsthorn, "Chapter 6. Is Design Still a (Cis)Man's World ?", in Alice Rawsthorn Design as an Attitude, Genève, JRP|Editions et Dijon, les Presses du réel, 2020, p. 65-75.
Quand j'entends parler d'autres designers noirs, je suis heureuse qu'ils soient là, à faire du bon travail comme tout le monde. En fait, je pense que la question des femmes est plus difficile à résoudre. En fin de compte, être un homme blanc est probablement encore le plus facile. Il n'y a pas de "Eh ! Regarde, il y a une1... "
Gail Anderson
Lorsque, en 1923, Gertrud Arndt a quitté son emploi dans un bureau d'architecte pour obtenir une bourse d'étude dans une école d'art et de design dont le prospectus promettait d'accueillir « toute personne de bonne réputation, sans distinction d'âge ou de sexe », elle avait bon espoir d'étudier l'architecture. Au lieu de cela, elle fut invitée à rejoindre l'atelier de tissage, comme la plupart des autres femmes qui s’inscrivirent comme étudiantes au Bauhaus. Celles qui refusèrent furent encouragées à choisir la céramique au motif que, « féminine », celle-ci convenait tout autant.
Mais le Bauhaus n’était pas le seul à perpétuer les stéréotypes de genre. Quelques années après l'accueil réservé à Arndt, une jeune décoratrice d'intérieur française —Charlotte Perriand — qui demandait à Le Corbusier de l'embaucher dans son atelier d'architecture parisien se vit rétorquer avec sécheresse : « Nous ne brodons pas de coussins ici2 ». Des décennies plus tard, en 1956, les téléspectateurs d'un épisode de l'émission de télévision américaine Home ont vu une Ray Eames mortifiée rejoindre son mari Charles à l'antenne après avoir été présentée par la présentatrice ainsi : « Voici Mme Eames et elle va nous dire comment elle aide Charles à concevoir ces chaises3 ». Une autre collaboratrice de Le Corbusier, l'architecte britannique Jane Drew, qui exerçait avec son mari Maxwell Fry, était tellement irritée d'être présentée à plusieurs reprises comme « Mme Fry » lors de conférences, qu'elle avait pris l'habitude de dire : « Je suis désolée que Mme Fry ne puisse pas être avec nous ce soir, à la place Miss Jane Drew a gentiment accepté de la remplacer4. »
Il n'est donc pas étonnant que tant de livres sur l'histoire du design soient remplis de références à des hommes — pour la plupart des hommes blancs, bien que ce soit une autre histoire. Les choses se sont améliorées. Un certain nombre de femmes designers sont aujourd'hui reconnues comme faisant partie des leaders dans leur domaine, notamment Hella Jongerius dans le design industriel, Irma Boom dans les livres, Ilse Crawford dans le design d’intérieur et Hilary Cottam dans le design social. D'autres femmes ont remporté les prix les plus prestigieux de design, les chaires et les postes de conservateurs qui semblaient autrefois réservés aux hommes. Pourtant, les designers les plus visibles et qui réussissent le mieux sur le plan commercial sont encore très majoritairement des hommes, même si les étudiantes sont majoritaires dans la plupart des écoles de design nord-américaines et européennes depuis plus de deux décennies. Et je n'ai pas encore côtoyé de femme designer, qu'elle ait réussi ou non, qui n'ait pas subi d’affronts et rencontré d’obstacles misogynes similaires à ceux dont Arndt, Perriand, Eames et Drew ont souffert il y a tant d'années. Quant à la communauté en pleine expansion des designers non-binaires qui préfèrent ne pas s'identifier en termes traditionnels comme homme cis ou femme cis, elle souffre d'autant, sinon plus, de préjugés.
Non pas que l’un ou l’autre de ces groupes serait épargné par de tels affronts dans d'autres domaines, mais ils ont vécu — et vivent encore — une période exceptionnellement difficile dans le domaine du design. Ils ne sont pas non plus les seules victimes des préjugés sexistes du design. La plupart d’entre nous en souffrons également. Si vous pensez que le design joue un rôle important dans l'organisation de nos vies et dans la conception des objets, des images, des technologies et des espaces qui les remplissent, il va de soi que nous avons besoin de designers de très haut niveau. Mais nous n’y arriverons que s'ils proviennent de tous les secteurs de la société, et pas seulement d'un seul sexe. Pourquoi le design est-il resté un « monde d'hommes » pendant si longtemps ? Et combien de temps encore la politique de genre d'une discipline, qui devrait en théorie être ouverte et éclectique, restera-t-elle aussi archaïque compte tenu de l’intérêt grandissant pour le féminisme de la quatrième vague, le transgendérisme et la fluidité des genres?
Les femmes ont, bien sûr, pratiqué le design tout au long de l'histoire mais, de façon non délibérée, elles ont joué le rôle de « conceptrices accidentelles » et produit des outils plus rustiques ou des armes plus mortelles en suivant le principe qui, propre à l'ingéniosité instinctive du design, dicte que « La nécessité est mère de l'invention ». Leur travail a rarement été reconnu, et pas davantage que celui des hommes qui ont conçu sur la même base intuitive. Jusqu'au XXe siècle, seul un nombre infime de femmes était autorisé à travailler comme designers professionnels, et mêmes celles-ci n’auraient eu que peu de chance d’y parvenir sans fortune ou relations sociales.
Prenons l'exemple de Lady Elizabeth Templetown, la plus célèbre des mondaines londoniennes qui a persuadé Josiah Wedgwood de lui laisser décorer ses pots ; c’était à la fin des années 1700, quand le design de céramiques était considéré comme un accomplissement féminin à la mode, au même titre que jouer du piano ou pratiquer la broderie. Templetown était une star des pages mondaines, et Wedgwood a sans doute été aussi sensible à la valeur promotionnelle de l'artiste qu’à ses compétences en matière de design, même si certains de ses motifs, principalement des scènes domestiques sentimentales, sont devenus des best-sellers. Les cousines Agnes et Rhoda Garrett qui, un siècle plus tard, ont prétendu être les premières femmes « décoratrices d'art », ou designers d'intérieur, de Londres, étaient tout aussi privilégiées. Aussi talentueuses et déterminées qu'elles fussent, les Garrett étaient aidées par le soutien financier du père d'Agnes, un marchand de maïs prospère, et par les commandes de ses sœurs, parmi lesquelles figuraient la militante du droit de vote des femmes Millicent Fawcett et le médecin pionnier Elizabeth Garrett Anderson5. Et c'est tant mieux, puisque le seul architecte qu'elles ont pu persuader de les prendre comme apprenties n'a accepté qu'à la condition qu'elles n'aient rien à voir avec le processus de réalisation si sale et « peu féminin6».
De même, les premières femmes à réaliser leurs ambitions architecturales ont le plus souvent pu y parvenir en construisant sur leurs propres terres et en utilisant leur fortune personnelle, comme l'ont fait les aristocrates britanniques Lady Elizabeth Wilbraham et Lady Anne Clifford, au XVIIe siècle, sur les domaines de leurs familles. Au milieu des années 1800, Sarah Losh7, héritière d'une fortune industrielle de Cumbria, a conçu une église, une école et construit des logements sur sa propriété dans le village de Wreay, tout comme la protagoniste de George Eliot, Dorothea Brooke, espérait le faire avec son plan de construction de « bons cottages » pour les locataires de son oncle dans le roman Middlemarch de 1874. Même au XXe siècle, une designer et architecte aussi douée qu'Eileen Gray a eu du mal à obtenir des commandes et a été contrainte de donner à la galerie de design qu'elle dirigeait à Paris dans les années 1920-1925 le nom d'un homme imaginaire, Jean Désert. Gray n'a pu mener sa carrière d'architecte que grâce aux revenus privés qui finançaient la construction des maisons qu'elle concevait pour elle-même. Charlotte Perriand est l'une des rares femmes d'origine modeste — son père travaillait comme tailleur et sa mère comme couturière dans l'industrie de la mode à Paris — à réussir à s'établir comme designer, puis comme architecte.
Pourtant, même Perriand devait en partie son succès au patronage masculin que représentait sa relation avec le cousin et principal collaborateur de Le Corbusier, l'architecte suisse Pierre Jeanneret. Il en est de même pour d'autres femmes designers de premier plan du début et du milieu du XXe siècle, qui étaient les épouses ou les maîtresses de praticiens masculins plus célèbres, à savoir Marion Dorn et Edward McKnight Kauffer, Lilly Reich et Mies van der Rohe, Jane Drew et Maxwell Fry, Ray et Charles Eames. Leurs réalisations étaient souvent confondues avec celles de leur partenaire, ou attribuées au népotisme — et souvent les deux. Dans les États-Unis de la fin des années 95, les femmes étaient si peu nombreuses à travailler comme designers que lorsque Harley Earl, responsable du design chez General Motors, a engagé neuf femmes pour travailler aux côtés des nombreux hommes de l'équipe de design de la société, leur présence a été jugée si inhabituelle qu'elles ont reçu un nom spécial : les « Demoiselles du design8». Personne n'aurait songé à donner un surnom aux designers masculins. Pourquoi s'en préoccuper, puisqu’ils étaient omniprésents ?
La motivation d'Earl était pragmatique, pas politique. À l'époque, deux conducteurs sur cinq aux États-Unis étaient des femmes, et les chercheurs de GM avaient remarqué qu'elles étaient loin d'être satisfaites du style et de la fonctionnalité de leurs voitures qui étaient, bien sûr, conçues par et pour des hommes. Des décennies plus tard, les théoriciennes féministes du design, comme la graphiste Sheila Levrant de Bretteville et ses collaboratrices du Women's Graphics Center de Los Angeles9, déploraient encore le caractère genré des objets et des images produits par les hommes qui continuaient à commander la plupart des projets de design commercial et à dominer les équipes de design qui les développaient, imprégnant les productions de leurs propres valeurs, ignorant les besoins des femmes ou les rejetant sous des clichés. Prenons l'exemple des premières baskets conçues spécifiquement pour les femmes, qui ont été lancées à la fin des années 1970 : leur style reflète leurs noms — « Princesse » et « Lady Jane » — par opposition à « Revenge Plus » et « Warrior » pour leurs équivalents masculins10.
Au début du XXIe siècle, les femmes designers sont devenues plus nombreuses et, progressivement, plus influentes. Ce n'est pas pour autant qu'elles ont été épargnées par les problèmes et les préjugés auxquels les femmes sont confrontées dans d'autres sphères : des abus sexistes et des humiliations mesquines, comme le fait d'être ignorées par des clients qui insistent pour s'adresser à leurs collègues masculins, aux défis pratiques, comme la lutte pour concilier responsabilités professionnelles et personnelles, en passant par la découverte qu’un homme ayant des qualifications similaires est mieux payé pour faire le même travail. Lorsque, en 2015, le designer conceptuel australien Gabriel A. Maher a effectué l’analyse de la représentation du genre dans les numéros d'une année du magazine de design néerlandais Frame, les conclusions furent choquantes. Plus de 8o% des personnes — principalement des designers et des architectes — photographiées dans les pages éditoriales et des modèles dans les publicités étaient représentés comme des hommes cis. Ils prenaient généralement des poses dégageant force et puissance, et étaient présentés par des titres dignes de héros tels que « Un maître rencontre la machine » et « Un homme déterminé ? ». Les femmes cis adoptaient des formes plus soumises, parfois coquettes, et étaient présentées comme des « divas du design », des « matriarches du métal », ou par d'autres expressions tout aussi stéréotypées que dérisoires. Plus tard dans l'année, IBM a été contraint d'abandonner une campagne de communication destinée à encourager les femmes à travailler dans les domaines de la science, de la technologie et de l'ingénierie du design, après que son public cible ait exprimé son indignation à l'idée d'être « mis au défi » de « pirater un sèche-cheveux »... Il n'est donc pas étonnant que les enseignants des écoles de design continuent de signaler que même leurs étudiantes les plus prometteuses souffrent encore d'un manque d'estime de soi et des divers autres problèmes de légitimité qui ont hanté les femmes à travers les âges.
Pourtant, il y a de plus en plus d'exceptions. Jongerius, Boom, Crawford, Cottam et d'autres femmes designers accomplies, telles que Gail Anderson et Frith Kerr dans le domaine du graphisme, constituent des modèles inspirants pour les jeunes femmes. Certains duos mixtes de designers ont choisi de travailler sous le nom de la femme plutôt que sous celui de l'homme ; c’est notamment le cas de Wield Somers et de son partenaire Dylan van den Berg, pour le Studio Wieki Somers à Rotterdam, et de Patricia Urquiola et Alberto Zontone à Milan. Négligées par le passé, les réalisations des femmes designers sont régulièrement célébrées dans des expositions, des collections de musées et des livres. Nombre des conservateurs de design les plus influents sont des femmes : notamment Paola Antonelli au Museum of Modern Art et Beatrice Galilee à New York ; Zoë Ryan à l'Art Institute of Chicago ; Catherine Ince au Victoria & Albert Museum à Londres ; Matylda Krzykowski à Berlin et Cecilia Leon de la Barra à Mexico. À l'heure où l'on s'intéresse au féminisme, à la non-binarité, aux campagnes #MeToo et #TimesUp, les politiques de genre du design sont explorées dans les livres et les débats organisés par des groupes de défense tels que Hall of Femmes et le réseau international Gender Design Network : tous deux opèrent à l’échelle mondiale depuis leurs bases en Suède et en Allemagne, ou via des blogs comme Depatriarchise Design, tenu par la designer zurichoise Maya Ober.
Malgré cela, les femmes semblent encore avoir du mal à s'imposer dans les domaines reconnus du design, en particulier le design industriel, peut-être parce que dans ces secteurs les perspectives d'un designer sont déterminées, la plupart du temps, par des hommes qui détiennent le pouvoir et passent des commandes prestigieuses. Hella Jongerius est jusqu'à présent la seule femme à avoir pénétré dans le groupe d'élite des grands designers industriels et à avoir été chargée de travailler sur des projets aussi ambitieux que son programme de design KLM. Son travail s'est d’ores et déjà avéré décisif : en accordant une plus grande importance aux nuances de texture, de couleur et de symbolisme dans les produits de grande consommation, il a fait des émules et demeure largement imité, bien qu’avec moins de rigueur et de sensibilité la plupart du temps.
Il est révélateur que les femmes aient tendance à progresser plus rapidement dans les nouvelles disciplines du design où il n'y a pas plus de gardiens masculins pour les empêcher d'assumer des rôles de leadership qu’il n’y en avait, dans les années 1970, pour entraver Muriel Cooper lorsqu’elle a pénétré le domaine naissant du design numérique. D'autres femmes ont depuis repris son flambeau, notamment la designer de logiciels Lisa Strausfeld, qui était l'une des étudiantes de Cooper et a donné le prénom de cette dernière à sa fille. Le design social est un autre domaine en pleine expansion où les femmes se sont illustrées, notamment Bianca Elzenbaumer de Brave New Alps, Sara Khurram et Iffat Zafar de Sehat Kahani, et Emily Pilloton qui, elle, organise des ateliers pour enseigner le design et la fabrication en tant que compétences vitales pour les communautés économiquement défavorisées des États-Unis11. Bilikiss Adebiyi-Abiola et Poonam Bir Kasturi12 ont toutes deux développé d’importants projets de design durable afin d’améliorer la gestion des déchets, respectivement au Nigeria et en Inde. De leur côté, Christien Meindertsma et la designer allemande Julia Lohmann sont à l'avant-garde des développements du design conceptuel. Elles suivent l'exemple de la designer britannique Fiona Raby qui, avec son partenaire Anthony Dunne, a réalisé d’importants travaux pionniers dans ce domaine. Compte tenu de la rapidité des progrès scientifiques et technologiques, et de l'acceptation croissante du projet de design comme solution possible à un éventail de plus en plus large de défis économiques, politiques et environnementaux, de nouvelles disciplines devraient émerger à l'avenir. Si cette évolution est synonyme d'autonomie pour les hommes, elle devrait l'être encore plus pour les femmes en leur permettant d'agir de manière indépendante dans le domaine du design, à l’abri des pressions qu’exercent les réseaux de vieux mecs13.
Les designers non-binaires devraient également en profiter. Ils sont sur le point de devenir les premiers bénéficiaires des nouvelles opportunités offertes par le design attitudinal, et devraient de plus en plus contribuer à nous épargner ces projets misogynes qui ont tant irrité les théoriciennes féministes du design à la fin du XXe siècle. Aussi incisives qu'aient été ces critiques à l'époque, elles semblent moins pertinentes à l’heure où les interprétations de l'identité sexuelle deviennent de plus en plus nuancées, raffinées et singulières.
Les définitions binaires de l'homme cis et de la femme cis étant de plus en plus dépassées, il est d'autant plus important que nous puissions tous décider de la manière d'exprimer les nuances de nos identités personnelles dans nos choix de design, plutôt que de laisser cette décision à l'establishment masculin cis qui a soutenu le « monde des hommes » du design pendant si longtemps.
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Gail Anderson citée dans Alice Rawsthorn, "Design Gets More Diverse", The International Herald Tribune, March 2011. www.nytimes.com/2011/03/21/arts/21iht-Design2&.html.
[« Cis » signifie « du même côté ». Opposé à « trans » dans des termes tels que « transgenre », par exemple, « cis » désigne, dans le néologisme « homme cis », un homme dont l’identité de genre ressentie est la même que celle qui lui a été assignée à sa naissance.] ↩ -
Esther da Costa Meyer, "Simulated Domesticities: Perriand before Le Corbusier", in Mary McLeod (ed.), Charlotte Perriand: An Art of Living, Harry N. Abrams, New York 2003, p. 36-37. ↩
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En 1956, Charles et Ray Eames étaient interviewés par Arlene Francis, l'animatrice et rédactrice en chef de l'émission de magazine Howe de NBC qui durait une heure. L'interview, d'une durée de 12 minutes, avait été programmée pour annoncer le lancement du fauteuil Eames Lounge Chair, conçu par les Eames pour le fabricant de meubles américain Herman Miller. ”America Meets Charles and Ray Eames”, posted by hermanmiller on November 23, 2011 : https://www.youtube.com/watch?v=IBLMoMhlAfM. ↩
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Shusha Guppy, "Obituary: Dame Jane Drew”, The independent, July 31, 1996, www.independent.co.uk/news/people/obituarydame-drew-1307641.htlm ↩
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Elizabeth Crawford, Enterprising Women: The Garretts and their Circle (2002), Francis Boutle Publishers, London 2009. ↩
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Lorsque Agnes et Rhoda Garrett montrèrent leur travail de décoration d'intérieur dans des expositions publiques, la réaction fut souvent hostile, parfois même ouvertement misogyne. Un critique, Lewis F. Day, a qualifié les meubles qu'elles exposaient à Paris, lors de l'Exposition universelle de 1878, de « maladroits et de mauvais goût ». Il a également affirmé que leur installation était la preuve « qu'il suffit de peu de choses pour satisfaire l'ambition des femmes décoratrices ». Annmarie Adams, Architecture in the Family Way: Doctors, Houses and Women, 1870-1900, McGill-Queen's University Press, Montréal et Kingston 2001, p. 151. ↩
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Jenny Uglow, The Pinecone: The Story of Sarah Losh, Forgotten Romantic Heroine — Antiquarian, Architect and Visionary, Faber and Faber, London 2012, p. 198-199. ↩
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En 1943, le puissant responsable du design de General Motors, Harley Earl, avait engagé Helene Rather comme première femme designer de la société pour l'aider à choisir les couleurs et les tissus de l'intérieur des voitures. Une deuxième femme, Amy Stanley, a rejoint l'équipe de conception deux ans plus tard. Ce n'est qu'au milieu des années 1950, lorsque Earl a recruté davantage de femmes, pour la plupart diplômées du programme de design industriel du Pratt Institute, que General Motors a utilisé leur présence comme outil promotionnel. La plupart des « demoiselles » se concentraient sur la conception de l'intérieur des voitures, mais quatre des nouvelles recrues furent envoyées dans une filiale de General Motors, la société d'électroménager Frigidaire, où elles conçurent des expositions commerciales, notamment la « Cuisine de demain » [Kitchen of Tomorrow]. Regina Lee Blaszczyk, The Color Revolution, The MIT Press, Cambridge, Massachusetts 2012, p. 249. [L’expression française de « Demoiselles du design » correspond à “Damsels of Design” en anglais]. ↩
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La graphiste américaine, Sheila Levrant de Bretteville, a ouvert le Women's Graphics Center, en tant que centre de ressource spécialisé, au sein du Woman's Building qu'elle avait cofondé à Los Angeles, en 1973, avec l'artiste Judy Chicago et l'historienne de l'art Arlene Raven. C’était un centre culturel et éducatif dédié aux femmes et accessible au public. ↩
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[On pourrait traduire par « Revanche + » et par « Combattant », voire « Guerrier ».] Christine Boydell, "Pump up the Power", in Pat Kirkham (ed.), The Gendered Object, Manchester University Press, Manchester 1996, p. 121-132. ↩
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[Aux États-Unis, l’expression « life skills », traduite ici par « compétences vitales », désigne les capacités comportementales qui permettent de faire face aux exigences et aux difficultés de la vie. Leur liste varie : citons, en rapport avec le contexte, la créativité, la coopération, etc.] ↩
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L'entrepreneuse indienne Poonam Bir Kasturi, qui a étudié au National Institute of Design en Inde, a fondé Daily Dump, un moyen amusant et accessible d'encourager les gens à composter leurs déchets, allégeant ainsi la pression sur le système public d'ordures à Bangalore. En plus de concevoir et de distribuer des kits de compostage, Daily Dump forme des personnes au compostage et aide des groupes similaires à s'établir dans d'autres endroits. ↩
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[Nous nous autorisons du contexte critique pour traduire « old boy’s networks » par « réseaux de vieux mecs ».] ↩